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Paradoxe de la flèche du temps DANS LA PENSÉE JUIVE

20 Juillet 2017 , Rédigé par Jechaiaou Perlenrel Publié dans #Réflexion, #etude bible et talmud, #Sciences

Paradoxe de La flèche du temps

dans la pensée juive

Si vous avez lu l’article scientifique sur le paradoxe de la flèche du temps, peut-être avez-vous compris grosso modo qu’il y a une tension sur la question de savoir si le temps s’écoule dans une direction déterminée, d’un début vers une fin, comme il nous apparait à notre échelle macroscopique globale (qu’on appellera ici l’échelle du כלל  KLAL) ou si le temps peut être inversé comme c’est le cas  à l’échelle microscopique des éléments individuels (échelle du פרט PRAT) .

Mon intention ici est juste de montrer que parfois, des outils d’analyse scientifique peuvent jeter un regard nouveau sur des concepts fondamentaux de la pensée juive.

Le sens de l’histoire pour le KLAL Israël

Quels sont les « a priori » du judaïsme qui fondent le discours juif ?

 Du postulat du Dieu Un découle un projet de société, (sinon pourquoi avoir créé le monde et pourquoi avoir dévoilé Sa Loi : la Thora ?) et la perspective du monothéisme est l'Histoire. La thora commence par un début : בראשית Berechit, et la finalité de ce projet de société est le Messianisme.

 Il y a bien là une flèche du temps mais de plus, ce temps de l’histoire contient une expansion entropique de la progression du projet divin.

Le KLAL Israël, le peuple juif, par les modalités de l'Alliance qu’il a contracté – respect des préceptes, circoncision, rituel de la Pâque… - s’est engagé à une adhésion à un système de valeurs éthiques prônant la supériorité d'un ordre culturel - ordre de la Loi, la Thora - sur l'ordre naturel - les lois du déterminisme de la nature-.

Le point de vue macroscopique prime sur le microscopique.

 Il y a un sens d’évolution vers le Messianisme, qui est rééquilibrage du monde par la Justice, telle qu'elle est préconisée par la loi juive, la Thora, et les prophètes. L’histoire avance  comme la revanche de la culture sur la nature et la condition de la réalisation de l'Histoire, c'est, face à la violence inscrite dans le monde, l'établissement du dialogue, instrument de l'instauration de la paix universelle.

Il est essentiel, pour que ce projet aboutisse, que le judaïsme perdure, donc que soit assurée la succession des générations - le mot histoire se dit en hébreu תולדות  toledot, ce qui signifie les générations. Ces générations, perfectibles grâce à la Loi, doivent atteindre un niveau culturel qui permette la réalisation des temps messianiques : l'Histoire est mutation de l'Humanité.

Pour le judaïsme, l'histoire du KLAL Israël, c’est-à-dire du peuple juif considéré dans son ensemble,  est orientée : elle a un sens, qui est la réalisation du projet divin défini dans le Pentateuque.

La teshuva,- le retour-, ou la réversibilité du temps pour le prat Israël - l’individu -  

La techouva (תשובה, « retour » ou « repentir ») est le processus de repentance dans le judaïsme, tant dans la Bible hébraïque que dans la littérature rabbinique. Conformément à la pratique juive, une faute, une erreur, un acte interdit, peuvent être réparés sous réserve d'engager une démarche de techouva.

Il est évident que nous sommes là à l’échelle microscopique individuelle.

Le juif en tant qu’individu possède le libre arbitre, il peut donc choisir à chaque instant de participer au projet divin, donne au KLAL Israël, et donc d’avancer dans sa pratique des préceptes, dans son étude, dans la perfection de ses qualités individuelles, ou au contraire reculer, régresser, commettre des fautes, des actes interdits. De telle sorte que, en regardant l’individu agir on ne saurait dire quel est le sens du temps messianique.

Mais surtout la Thora a mis à notre disposition le processus de la TECHOUVA –du retour- . Le comportement du repentir ne fait pas partie de la pensée naturelle, (j’entends par pensée naturelle la perception du monde que peut avoir le commun des mortels en examinant les choses à son échelle). La techouva n’est ni innée, ni acquise par la culture ambiante habituelle, elle est introduite dans la conscience de l’homme par la révélation prophétique.

 Car le temps pour la pensée naturelle est connu comme irréversible.

Sans révélation prophétique, la notion de retour dans le temps est impensable pour celui dont la conscience fonctionne d’après les normes naturelles.

La Techouva implique toute une conception du temps où il est possible de revenir en arrière pour faire le Tikoun la réparation d’un dévoiement - d’avoir dévier du droit chemin-. C’est d’ailleurs une image que j’emprunte à Maïmonide : la voie droite – derekh hayechara. La faute consiste à dévier de la voie pour faire demi-tour. Et le Tikoun est la possibilité  de pouvoir revenir en arrière  – lachouv- dans le temps de la conscience au point temporel où il y a eu ce dévoiement pour pouvoir reprendre la voie droite.

Il faut avoir assimilé une perception du temps réversible, comme par exemple celle qu’observent quotidiennement les physiciens dans leur analyse microscopique de la matière, pour mieux comprendre comment contrairement à notre pensée naturelle, il est possible de revenir dans le temps.

Mais cette notion de retour n’est pas seulement géographique ; comme nous l’avons vu, le sens de l’histoire, le derekh hayechara, apporte de la valeur ajoutée, une espèce d’expansion entropique.

Alors il n’est pas étonnant que pour certains le repentir soit difficilement concevable qualitativement. C’est le cas du prophète Jonas -  Yonah ben Amitaï : étymologiquement son nom se rattache au mot de Emet-Vérité. S’il s’agit d’un prophète qui prophétise au nom de la vérité absolue, il ne peut admettre que le repentir soit possible. C’est pourquoi lorsque Dieu lui demande de prophétiser à Nivive pour exhorter sa population au repentir il refuse. La notion de repentir entre en collision avec une conception de la justice du point de vue Emet absolu, ce serait trop facile…  Il y a une faute et il suffirait du repentir pour être pardonner ?

Le Dieu de la justice absolue ( qui régit le KLAL) ne peut pas admettre le repentir, qui lui est l’attribut du Dieu de la miséricorde (maitre de la providence individuelle – hachgakha pratit -) .

Dans le Talmud au traité  Yoma (86 b) Reich lakich affirme :

והאמר ריש לקיש גדולה תשובה שזדונות נעשות לו כזכיות

 

« Le repentir (par amour) est une grande chose car il transforme la faute en mérite

 

Quel enseignement remarquable ! La techouva n’est pas seulement l’occasion de revenir en arrière afin d’avoir une deuxième chance. Ce n’est donc pas qu’une rédemption, c’est beaucoup plus que cela, il s’agit d’une réversibilité qualitative. On transforme la néguentropie en entropie ! Le repentir effectué par amour renverse le sens du chemin, ce que nous avons parcouru à reculons est transformé en points bonus kilomètres sur la voie droite - le derekh hayechara-..

 

Cette tension traditionnelle dans la pensée juive entre le KLAL et le PRAT, entre l’idéal et la réalité, entre la Justice et la Miséricorde, me semble trouver une conciliation harmonieuse avec cette triple compréhension de la notion de Techouva car

  • Le but de la techouva est qu’elle soit réalisée par TOUS les individus afin de permettre le déroulement de l’Histoire par l’avènement pour le Klal Israël de l’ère messianique.
  • Mais la thora a été donnée aux individus, au PRAT Israël, et à ce niveau-là, le temps est réversible, le retour est permis.

Enfin nous avons compris que ces deux démarches s’unissent dans la sphère de l’harmonie, de la beauté et de l’intégration qu’on appelle TIFERETH avec cette réversibilité qualitative de la notion de Techouva qui est le Repentir (avec un grand R) par AMOUR,...

mais en sommes nous  capable ?        

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